Il doit être clair, pour les tenants du Yoonu Yokkute, qu’ils devront assumer toutes les conséquences de leurs manigances, au lendemain des locales du 29 juin 2014. Ils ne devront s’en prendre qu’à eux-mêmes, s’ils subissent des « dommages politiques », du fait de la série d’actions illicites qu’ils ont initiées pour devenir les maîtres du pouvoir local. Ils ne pourront dès lors, pas se prévaloir de leur propre turpitude !
Le cirque électoral, auquel nous assistons depuis plusieurs mois, caractérisé par des entorses graves aux règles élémentaires de la démocratie électorale- comme l’a démontré un expert électoral, vice-président de l’Alliance Jëf-Jël- constitue, en soi, avant même que ne se tienne le scrutin du 29 juin 2014, un exemple achevé de régression démocratique majeure, en porte-à-faux avec les nobles idéaux de la révolution citoyenne portée par les initiateurs des Assises Nationales, les militants du M23, le mouvement Y’en a Marre…
En effet, dans l’histoire politique du Sénégal, c’est la deuxième fois qu’il va falloir voter pour ou contre les intérêts d’un clan familial, lors d’élections locales. On se rappelle tous, comment cela s’était terminé en 2009, pour la génération du Concret !
Jamais auparavant, aura-t-on assisté – de manière aussi flagrante- à des distributions de vivres, en pleine période de soudure, en plein cœur de la capitale, aux fins supposées d’achat de conscience, en vue de remporter des élections ! Jamais auparavant aura-t-on accordé autant de crédits à des mbootaay ou autres GPF ! Et, comme par hasard, la phase de généralisation du Programme national des bourses de sécurité familiale (PNBSF) a été lancée à Kaffrine, le 19 juin 2014, en pleine campagne électorale pour les locales !
Il faut reconnaître, qu’au-delà du choix des futurs maires et présidents de conseils départementaux, il s’agira lors des élections locales en cours, d’entériner l’acte 3 de la décentralisation, censé traduire l’ambition du Président Macky Sall d’instaurer une nouvelle phase du processus de décentralisation.
Malheureusement, ce projet de réforme de la décentralisation, qui est loin de faire l’unanimité au sein de la coalition Bennoo Bokk Yakaar, a royalement ignoré le contexte politique marqué par le consensus sur la Charte de Gouvernance Démocratique et la mise sur pied de la Commission Nationale de Réforme des Institutions. C’est ainsi que la réforme de la gouvernance locale, qui devait s’inscrire dans la dynamique globale de la refondation institutionnelle, en a été extirpée, pour assouvir les instincts politiciens les plus inavouables.
Pendant que les citoyens sénégalais pensaient, par leur acte de vote, œuvrer pour un approfondissement du processus démocratique et un renforcement de la décentralisation, le Président Macky Sall a tôt fait de les détromper, en précisant sur les antennes de la RFI, qu’il s’agit en fait d’organiser des primaires au sein de son Parti- fantôme (et/ou de sa Coalition aux ordres ?). Chercherait-il à noyer le poisson, face à l’urgence des réformes institutionnelles ?
Il est déplorable, que les alliés du président, dont certains se sont plaints du manque de concertation au sein de la coalition Bennoo Bokk Yakaar, fassent preuve de “couardise politique”, en pensant pouvoir continuer à siéger au gouvernement, tout en occultant la question de la refondation institutionnelle et en s’opposant aux militants du parti présidentiel au niveau local.
Quelle peut donc être la légitimité d’une Coalition, dont les membres font preuve d’autant de désaccords sur une réforme aussi capitale que l’acte 3 de la décentralisation ? À moins que les divergences ne portent que sur des intérêts crypto-personnels !
Les actes de défiance de Khalifa Sall et de Cheikh Bamba Dièye contre la famille, le proche entourage et le parti présidentiels auraient gagné en cohérence, si leurs partis respectifs avaient rompu avec la Coalition Bennoo Bokk Yakaar.
Le désistement de Malick Gackou de sa candidature de la mairie de Guédiawaye, venant après le blanc-seing de son secrétaire général en faveur du Président Macky, pour les présidentielles de 2017, amène à se poser la question de la démocratie interne au sein des Partis et de la prééminence d’ambitions individuelles et égoïstes sur les enjeux locaux.
Il faut saluer la rébellion salutaire et courageuse des animateurs de Macky 2012 contre l’achat de consciences, l’utilisation des moyens d’Etat par des dignitaires de l’APR et la patrimonialisation de l’Etat et des biens publics par un clan familial.
Enfin, l’absence de rupture véritable par rapport à la gouvernance wadiste et le manque de délimitation des objectifs politiques des élections locales ont permis au parti démocratique sénégalais et à son leader historique de s’immiscer, de manière indécente et inélégante dans la campagne pour les élections locales, dans le seul objectif d’obtenir la libération de son fils et de ses militants ayant maille à partir avec le pouvoir judiciaire.
C’est donc dire que les locales du 29 juin 2014 ne peuvent aider à régler les problèmes de démocratie interne au sein des partis !
De même qu’il est attendu du Président Macky Sall, au-delà des péripéties post-électorales, qu’il se conforme enfin à la lettre et à l’esprit de la Charte de Gouvernance Démocratique, qu’il a signée dans l’entre-deux-tours de la présidentielle de février-mars 2012.
Pour que vive le référendum sur les réformes institutionnelles !
Dr Mohamed Lamine LY
Médina-Rassmission