Par Bassirou S. NDIAYE
Le Gladiateur n’appartient pas au Peuple des Assises. Confortablement logé auprès de l’Empereur même si l’apparition de petites punaises sous son fauteuil commençait déjà à l’incommoder, il les avait combattues, allant jusqu’à interdire l’accès des salles de conférence de sa commune au comité régional qui avait fini par se contenter d’une modeste case-foyer en ruine pour tenir ses réunions. Etait-ce pour plaire ou pour convaincre l’Empereur de le « laisser à ses cotés » tel qu’il l’avait plaidé à l’époque auprès d’un puissant membre de clergé, ou simplement avait-il une vision radicalement opposée aux propositions en gestation ? L’histoire a déjà répondu à cette interrogation à travers un SMS envoyé depuis la Chine à ses nouveaux alliés et non moins porteurs des CNRI à propos desquelles il avait dit : « Je prendrai dans son contenu ce que je jugerai bon. Dans tous les pays, c’est de cette façon que les choses marchent ».sic !
En allant battre campagne au moment où la majorité issue du Peuple des Assises manifestait contre « le deuxième-troisième mandat » dont l’actuel référendum couverait une version bis, il avait laissé entendre sans le dire, qu’il n’était ni contre la constitution de l’Empereur ni pour l’éventuelle que lui proposait le Peuple des Assises.
Tombé comme une météorite, le « référendum du Gladiateur » ne pose donc pas seulement la question : « Pour ou contre la constitution de l’Empereur déchu ». Réduire le débat actuel à cette seule formule comme chercherait à le laisser croire un peu trop naïvement ou peut être subtilement, un leader de la coalition au pouvoir, c’est prêcher la théorie du moindre mal, comme s’il ne pouvait arriver que du mal au royaume de Ndoumbélaan. Notre intime conviction est que le « référendum du Gladiateur » nous pose plutôt la question suivante : « Etes-vous pour ou contre mon alternative à la réforme des institutions telle que proposée par la CNRI » ?. Autrement dit, devons nous, nous contenter du slip que le Gladiateur nous propose ou préférerions-nous rester avec le « Ngeemb » taillé par l’Empereur déchu en différant l’incontournable heure des changements véritables ?
Pour les patriotes, il s’agit d’un dilemme cornélien plus localement connu sous le nom de la fameuse « soupe de Coumba Socé : Naan ko dee, baayi ko dee ? » Heureusement que nous ne sommes pas tenus de choisir parmi les choix autocratiques du Gladiateur. En répondant au fond et à la forme, c’est dire au référendum tel que formulé et à la manière dont il est posé, nous devons garder à l’esprit que nous concevons pour l’histoire, le cadre où vont se mouvoir sans entraves les générations futures, ou face auquel ils vont devoir se battre pour le rendre plus attractif et plus conforme à une république vraiment démocratique.
Pour des motifs qui échappent à notre simple compréhension des choses, de Grands Messieurs du droit viennent de lui signifier publiquement qu’il a mal posé le débat. En prenant à témoin Goorgorlu, ces Grands Messieurs des sciences, commencent manifestement à l’énerver, puis à l’inquiéter. Et c’est certainement la raison pour laquelle, le Gladiateur qui les avait royalement méprisés en concevant dans son laboratoire son cocktail magique, cherche à les rencontrer, sûrement pour tenter de les convaincre avec des arguments… moins juridiques ? Déjà trop tard, ou peut être matériellement impossible ? A moins que….
Le « référendum du Gladiateur » propose en effet à travers une somme de mots ésotériques, des solutions à des maux multiples et simples, que Goorgorlu peut appréhender sans devoir se référer à l’avis des agrégés et des docteurs de sciences : l’élaboration d’un cadre juridique et institutionnel favorable à l’émergence d’une gouvernance démocratique qui apporterait une solution définitive à la question de sa DQ.
Malheureusement, les mots et les maux ne veulent pas dire la même chose pour les acteurs en conflit, et leurs interprétations ne participent pas à éclairer sa lanterne. Il sera donc difficile dans ses conditions de lui faire avaler cette potion dont il ignore l’origine, d’autant plus qu’il ne fait plus confiance et vraiment pas du tout, au Gladiateur de plus en plus suspect de plagiat de mots et de maux de son illustre maitre. Même si tous les acteurs semblent faire appel à son arbitrage, Goorgorlu ne se sent pas concerné par ces consultations.
- Il ne voit pas pourquoi le Gladiateur lui demanderait maintenant son avis alors qu’en visite dans le nord de Ndoumbélaan, il s’était montré particulièrement inélégant en ces termes : «n’importe qui se permet de parler de mon mandat». sic ! Sans grade et sans chapelle, il avait profondément été humilié par ces propos qui lui étaient manifestement adressés. Il s’était juré en conséquence de ne plus jamais se mêler des querelles des « Messieurs d’en haut ».
- Il se moque de la durée du mandat, autant qu’il se moque de la tête de ceux qui s’agitent pour défendre l’idée qu’un référendum sans réduction immédiate de sa durée ne soit qu’une arnaque politique. Il a même l’impression que cette opposition là, dont certains sont assis sur des milliards illicites, approuverait n’importe quelle proposition du Gladiateur incluant cette revendication crypto personnelle, y compris sa condamnation à mort en tant que « n’importe qui».
De toute façon, le diagnostic autocratique fait par le Gladiateur de la constitution monarchique de la république de Ndoumbélaan, ne pouvait déboucher que sur des solutions non systémiques du tout, et conséquemment sur un remède symptomatique et ou douteux. Pourtant, il serait inexact de dire que le fameux « référendum du Gladiateur » n’apporte rien de bon. C’est plutôt un habit mal taillé et pas du tout sur mesure, qui couvre peut être le corps sans garantir l’aisance et la commodité de son usager, un panier pourri de fruits pouvant contenir quelques bonnes surprises, ou encore un ballot de friperies d’où on peut tirer une tenue de gala.
Parce qu’il n’est pas présenté comme une série de QCM d’où il serait possible de tirer la bonne graine de l’ivraie, il est inconcevable de demander à Goorgorlu de l’approuver. Il ne veut pas l’approuver sans se l’approprier, et il ne peut aussi pas se l’approprier parce qu’il n’apporte pas de réponses aux questions qu’il se pose maintenant.
C’est pourquoi, il regrette encore que les Grands Messieurs des sciences n’éclairent pas sa lanterne sur les conséquences d’une abstention éventuelle. Son parti voudrait en ce cas, mobiliser autour du seul mot d’ordre à la dimension de ses préoccupations : « Citoyennes et citoyens de Ndoumbélaan, étrangers qui disposeraient illégalement d’une carte d’électeur frauduleusement confectionnée, ne votez rien !!! ».
LES CHRONIQUES DE BANDIA, Février 2016