Y A BON BANANIA !!!

Par Bassirou S. NDIAYE

Ndoumbélaan n’a pas su transmettre la flamme patriotique à travers les générations. Le royaume n’a pas appris à haïr les situations de servitude, d’humiliation et de domination des peuples. Il n’a pas su se donner les moyens pour dire : « jamais plus çà » ! En faisant semblant d’ignorer les périodes les plus douloureuses de son histoire, plus qu’en les assumant comme une somme de suites de tragédies, il a appris à les tolérer d’abord, à les banaliser ensuite, et enfin à les aduler.

Héritier du nègre marron ou du supplétif de l’armée coloniale où il exécutait les plus sales besognes, le Gladiateur du haut du trône du royaume, se vante d’être le descendant des collabos ayant accompagné pendant quatre cents ans les envahisseurs dans leurs entreprises d’oppression, d’aliénation et de pillage des ressources du continent, … en échange de desserts. Mais pouvait-on honnêtement s’attendre à un autre produit après avoir semé une telle graine ? Nourri au biberon des collaborateurs du système colonial, moulé dans la boue de l’obéissance, il conçoit la servitude y compris la nuisance des siens, comme un moyen de différenciation et de valorisation de l’indigène. La note du maitre est son unique étalon de valeur, à coté de celui du travail, du patriotisme militant et de la morale.

Ndoumbélaan n’a pas fait le procès de la collaboration qui a rendu possible la traite des esclaves et la domination coloniale pendant des siècles, au point de la regretter en tant que « privilégié » parmi ses frères du continent. En vérité, le Gladiateur dont les propos nous irritent aujourd’hui, est malheureusement le produit logique du mensonge, des non-dits et des mal-dits autour desquels est façonnée l’histoire du royaume. Une histoire tissée autour des « quatre communes », (la genèse du mensonge à la genèse), qui invitait les natifs de Sagata, de Thillé et de Kobo Ngoye à faire du faux et à user de faux en écriture pour se forger une seconde naissance à Gorée ou à Saint Louis. C’était le choix à faire pour avoir droit au dessert à la table de Faidherbe et de Pinet Laprade, à coté de leurs compatriotes soumis au régime des travaux forcés, au riz sans sel et à la déportation.

Le mensonge colonial, en faisant de frères utérins, l’un sujet et l’autre citoyen, l’un prince et l’autre esclave de l’empire selon la volonté du maitre, a façonné une ligne de démarcation séparant des familles, des états et des peuples que rien ne différencie. La distribution aléatoire des peuples, des familles et des états de part et d’autre de ce « mur de la honte » reste la plaie mal cicatrisée au front du continent. Toute volonté d’unité des « peuples encore non entrés dans l’histoire », se heurtera et bien longtemps encore à l’égoïsme de ceux qui en tirent profit, mais aussi à la complexe folie de complexés façonnés par l’histoire et la géographie pour en assurer la garde.

L’apologie du colonialisme dont s’est rendu coupable le Gladiateur, va malheureusement bien au-delà de la simple adulation du maitre par l’esclave à qui on a « inculqué la peur et le doute ». Elle épouse la dramatique revendication du statut de support dans l’entreprise coloniale d’asservissement et de domination des peuples, avec les privilèges y afférant. Aujourd’hui, elle se décline en autorisation de prise de positions diplomatiques dans la géopolitique mondiale, qui passe sous silence le massacre quotidien de palestiniens, de centaines de jeunes filles réduites en esclaves sexuelles au Nigéria, tout en condamnant fermement les punitions infligées à des journalistes repus qui revendiquent leur droit de ridiculiser des prophètes comme dessert. Elle se traduit également par le devoir de cession de nos ressources naturelles, et en obligation de quotas pour les entreprises de « nos amis » dans la distribution des marchés publics etc.

Il en résulte une politique de neutralisation et de négation de soi, d’annihilation de valeurs sociales et culturelles, mais également de naturalisation des crimes passés et présents, comme bienfaits de la colonisation. C’est autour de ce paradigme que se noue la pratique politique à Ndoumbélaan, devenue un nouveau PMU. Au jeu de hasard, elle a emprunté le vocabulaire et la passion autour des favoris, des tocards, des outsiders et des non-partants. Le client ne parie qu’aux seules fins de multiplier sa mise personnelle. Chaque scrutin, chaque échéance, oriente la meute avide de gain, en fonction des pronostics de la presse, des côtes, et de la forme du moment des candidats déclarés. Même des chefs religieux interdits de jeux de hasard, misent discrètement sur deux, trois, quatre,…. chevaux, pardon, candidats. Une seule musique, un seul discours est écouté : le montant de la cagnotte mise en  jeu !

Initiateur de la CNRI, le Gladiateur s’est attaqué ouvertement et peut être plus franchement enfin, à la charte des Assises Nationales. Totalement libéré de toute obligation morale vis-à-vis de ce truc « qui n’est ni la bible ni le coran » SIC., par le silence coupable de ses principaux animateurs bien au chaud à ses cotés, il vient de déchirer pour toujours la Charte des Assises Nationales. Après sept ans de reniement et de ruse, où tout le monde a été grugé, mouillé par un scandale, compromis dans sa bonne foi ou non, voici le dessert servi sous la forme de discours fondateur de ses « convictions ».

Si les limites littéraires et politiques en cachent mal les desseins, la série d’ouvrages inaugure peut être un nouveau « Mein Kampf » tropical qui risque de sonner le début d’un génocide de la démocratie et des démocrates sur toute l’étendue du royaume.  Ses opposants derrière les barreaux ou empêtrés dans querelles plus religieuses que politiques, on peut douter de la place laissée à un débat franc. Le risque est donc plus que probable pour que les prochaines élections ressemblent plus à celles de miss « jongama » où les fonds et les  formes  primeront sur le fond.

 

BANDIA, JUIN  2018

 


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