DICTEE PREPAREE.

La tentative malheureuse de l’Empereur déchu de Ndoumbélaan de transmettre « démocratiquement » le pouvoir à son rejeton a communément été qualifié d’entreprise de dévolution monarchique. Mais la dévolution monarchique est plutôt perçue comme un mode de transmission de pouvoirs au sein d’un groupe restreint de personnes, généralement une famille biologique. Héritage de l’histoire, structurée autour d’un ensemble de règles qui s’impose à l’intérieur et à l’extérieur, la dévolution monarchique n’a pas toujours coulé comme un long fleuve tranquille. Si elle est de moins en moins contestée, c’est qu’elle est devenue une affaire privée au sein des familles de monarchies qui passent plus aujourd’hui comme un pan de culture nationale, souvent sans lien hiérarchique avec l’exercice démocratique du pouvoir politique issu de suffrages des peuples. La monarchie peut même être amenée à jouer un rôle de régulation du jeu politique. Ciment symbolique de nations, elle est consultée discrètement pour gérer les impasses entre les acteurs en compétition. 

Cependant, l’entreprise de dévolution du pouvoir peut ne pas être que monarchique et revêtir un caractère philosophique, culturel, ethnique ou religieux. Elle peut être biologique au sein des confréries religieuses et des sectes, en suivant des règles banalement gérontocratiques, quelquefois morales, ou plus ou moins ésotériques. La dévolution idéologique du pouvoir est quant à elle  le pilier des partis. Indispensable pour garantir l’orientation politique, économique et sociale des formations, elle est structurée autour de règles qui définissent le mode de fonctionnement appelés statuts, d’acceptation ou d’exclusion des membres. Mais une formation politique n’est pas une nation et le citoyen d’un pays ne peut être assimilé à un militant dont l’appartenance à un parti relève de choix et non de circonstances. La dévolution du pouvoir au sein et au sommet de l’état, en devient donc plus complexe.

Et pourtant, tous les gouvernants sont animés par des désirs de dévolution de pouvoir, dictés par le réflexe de survie et de préservation d’intérêts de classes au sens moins marxiste du terme. Si une constitution solide s’y oppose, elle ne suffit pas toujours à empêcher des tentatives subtiles, antidémocratiques, voire criminelles, même parmi ce qu’on appelle communément les « grandes démocraties ». La nécessité s’impose toujours aux promoteurs de telles entreprises, de légiférer, de construire et/ou de déconstruire un arsenal juridique et/ou répressif pour endiguer le système et le protéger de forces de changement. Dans les pays de dictature (rampante ou bien installée), la constitution qui s’érige comme un obstacle, est passée à la moulinette, désossée et ramollie par une série de réformes « démocratiques », « consolidantes », ou par un référendum ….. en quinze points. Que celui qui se sent morveux, utilise un mouchoir à jeter ou se replie le coude avant de se moucher. La troisième vague du corona est déjà là.

L’apartheid, la colonisation, l’esclavage, la ségrégation raciale et toutes les formes de dictatures connues, définissaient un ordre public à protéger dans l’espace et dans le temps, qu’on croyait éternel, ….. ou bâti pour durer mille ans comme en rêvait d’Hitler. Avant leurs fins toujours tragiques, ces systèmes reposaient sur un arsenal juridique et répressif où toutes formes de leur remise en cause étaient qualifiées d’entreprises de troubles à l’ordre public, donc de délits ou de crimes.

Le Gladiateur n’échappe pas à cette tendance et à cette tentation. 

  • Idéologiquement peu marqué, il est connu et reconnu comme le serviteur sans concession du néocolonialisme symbolisé par la Françafrique, qu’il soit de droite ou de gauche ;
  • Sociologiquement friable, il refoule au sens freudien ses origines, et peine à réussir  son intégration solidaire avec les couches sociales classiques structurées;
  • Contestée, la foi du Gladiateur est remise en question dans certains milieux à cause de son appartenance supposée ou réelle à des associations jugées hérétiques par les défenseurs des religions révélées.

C’est cette personnalité ou plutôt cette absence de personnalité qui s’accroche à toutes les formes de regroupements humains, sociaux ou géographiques, en cultivant le sentiment d’être un des leurs et d’exercer le pouvoir en leur nom. En rusant, il suscite chez des marginaux ethniques prompts à brandir le sabre, des religieux en mal d’audience ou des régionaux en quête d’amélioration de leurs conditions de vie, des penchants grégaires. Il crée ainsi, des fractures heureusement sans lendemains qui affectent périodiquement l’unité et la cohésion nationale. En réalité ses supposés penchants ethniques, régionalistes, religieux ou confrériques ne vont jamais au-delà de l’intérêt qu’il peut en tirer pour son pouvoir et ses ambitions personnelles.  

Si la tentation est grande de prolonger son séjour sur le trône de Ndoumbélaan, qui passerait forcément par une candidature de tous les dangers à un troisième mandat, c’est bien parce que le Gladiateur n’a pas d’autres alternatives qu’une auto dévolution du pouvoir. Parce que le Gladiateur est singulièrement seul, sociologiquement sans attaches affectives avec un groupement humain structuré y compris sa propre formation politique et sa coalition-G.I.E. C’est surtout parce qu’il est le seul à pouvoir continuer à exercer ce pouvoir tel quel, sans risquer les retournements de bâton synonymes de coup de poignard dans le dos. 

Mais comme tous les dictateurs avant lui, il croit avoir appris des échecs de ses devanciers, pour réussir l’impossible pari d’un règne jusqu’à l’horizon 2030. Mais si les pauvres ont de riches idées, les rêves fous appartiennent aux illuminés.

BANDIA, JUILLET 2021


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