
Depuis quelques semaines, l’équipe médicale de Sancombao a entrepris de mettre en oeuvre un projet de santé communautaire destiné à la protection des couches vulnérables.

Le projet s’intéresse à la banlieue qui occupe la partie orientale de la Région de Dakar, faisant frontière avec la région de Thiès. La banlieue dakaroise regroupant les départements de Guédiawaye, Pikine, Keur Massar et Rufisque occupe environ 86% de la superficie de la Région de Dakar, alors que 63,4% de la population y vivent.

En 2020, la Région de Dakar avait une population estimée à 3.938.357 habitants et une superficie de 550km2 soit 0,3% de la superficie nationale.
La Région de Dakar, où est concentrée, la plus grande partie de l’offre sanitaire nationale regroupe plus de 25% de la population du Sénégal.
Ces dernières décennies, la banlieue dakaroise, a été le théâtre de mutations sociales diverses et contradictoires.
Premièrement, on a observé une exacerbation de l’exode rural, avec un afflux massif de populations de l’intérieur, une occupation anarchique de l’espace (parfois sur des
zones non-aedificandi), source de catastrophes naturelles (inondations) et d’exposition à des substances nocives (voisinage d’industries chimiques, pesticides). Ensuite, on a observé, suite à la saturation foncière du département de Dakar, une ruée de couches moyennes vers des cités nouvelles, à la périphérie des quartiers et villages traditionnels.

Il en a résulté un accroissement et une transformation de la demande de soins
Classiquement, les problématiques sanitaires au niveau de la banlieue étaient dominées par des affections liées à la pauvreté (transmissibles, carentielles, en rapport avec la santé reproductive), que le système public de santé a toujourd tenté, de maîtriser, tant bien que mal, grâce à la stratégie des soins de santé primaires.
L’OMS recommande d’améliorer la survie et le bien-être des enfants et des mères.
En 2019, on estimait que 5,2 millions d’enfants âgés de moins de 5 ans sont morts le plus souvent de maladies qui pourraient être évitées ou traitées. Il s’agit, notamment de complications associées aux naissances prématurées, à l’asphyxie néonatale, aux traumatismes, aux infections respiratoires aiguës, aux diarrhées, au paludisme…
La plupart d’entre elles peuvent être évitées ou traitées au moyen d’interventions simples et peu coûteuses notamment la vaccination, une nutrition adéquate, de l’eau potable et des soins de qualité fournis par un prestataire de santé le cas échéant.

Par ailleurs, la transition épidémiologique en cours dans le monde, fait que les maladies chroniques sont responsables, depuis 2020, de trois décès sur quatre dans le monde (OMS) n’a pas épargné les zones suburbaines. De fait, de plus en plus de décès sont dus aux maladies chroniques suivantes: maladies ischémiques, accidents vasculaires cérébraux et diabète.
La démographie galopante et l’explosion universelle des MNT, évoquées précédemment, ont induit une demande croissante en soins surtout tertiaires, sans évolution significative de l’offre de soins, rendant plus en plus difficile l’accès aux soins, encore davantage en banlieue victime d’un retard historique, pour ce qui est de l’offre de soins de qualité. Pour preuve, le premier centre hospitalier de la banlieue a été inauguré en 2006 à Pikine. C’est dire que l’accès aux soins est loin d’être garanti, à cause de nombreux obstacles liés à l’accessibilité financière et à la faible capacité d’accueil.
De plus, on observe de nombreux manquements de la carte sanitaire se traduisant par une insuffisance et/ou une mauvaise répartition des infrastructures, équipements et ressouces (humaines et financières). Il en a résulté une floraison de structures privées paramédicales et médicales, qui, pour l’instant, semblent privilégier la marchandisation effrénée des soins curatifs, une surconsommation médicale, avec une sur-prescription d’examens complémentaires et de médicaments.
C’est ce qui explique le rôle d’appoint que sont appelés à jouer, pour longtemps encore, le secteur privé de la santé et la médecine traditionnelle, devenus une sorte de « mal nécessaire ».
Déficit de régulation de la part des autorités sanitaires et des ordres professionnels

S’agissant de la médecine traditionnelle, il faudra veiller à préserver la sécurité́ des patients, tout en prenant en compte les intérêts des praticiens. Pour ce qui est du secteur privé médical, il gagnerait à être mieux réglementé pour éviter plusieurs phénomènes négatifs :
- Intrusion de logiques mercantilistes au sein du secteur public de la santé comme le non-respect des plages horaires dévolues à l’exercice privé, rabattage / détournement des patients vers le privé, travail noir
- Mal-gouvernance au sein des instituts de prévoyance maladie (I.P.M) avec parfois, des cas de corruption et/ou de fraudes à l’assurance (tricheries sur l’identité des ayant-droits, fausses prescriptions, revente des médicaments,)
- Concurrence déloyale avec non-respect de cahiers de charges ni des normes et procédures (consultations médicales dans les officines pharmaceutiques ou prestations en biologie dans des cabinets médicaux)
Un autre défi est constitué par le déficit de protection sociale.

Depuis quelques années, on assiste à la mise en œuvre de la couverture sanitaire universelle, qui a pour objectif de garantir à toutes et tous l’accès à des services de santé de qualité, indépendamment de la capacité de chacun à payer. Pour le moment, les innombrables possibilités de coopération de la CMU avec le secteur privé demeurent sous-exploitées , restant confinées aux travailleurs du secteur privé moderne (IPM, assurances…).