Par Bassirou S. Ndiaye

Humilié à Diên Biên Phu, l’Empire cherchait à redorer son blason et surtout à donner un avertissement aux peuples sous domination coloniale sur le continent. Face au soulèvement populaire en Algérie, il fallait donc donner une bonne raclée aux « rebelles » et remettre à leur place les indigènes historiquement condamnés au bas de l’échelle. C’est ce qui explique en partie la cruauté avec laquelle il a mené la lutte contre le FNLA et le peuple algérien.
Mais quatre ans après la débâcle indochinoise, soit quatre ans aussi après le début de la lutte armée dirigée par les patriotes algériens, l’Empire avait compris que les revers déjà subis par ses forces coloniales allaient le conduire inéluctablement vers une nouvelle humiliation, une première sur le continent africain.
Puisque la République ne pouvait vivre sans l’empire (constat toujours actuel), le « référendum » de 1958, officiellement baptisé « pour ou contre la Communauté », fut soumis à nos dirigeants, beaucoup plus qu’à nos peuples. C’est un fait certes difficile à revendiquer, mais qui doit être moralement assumé. Ce référendum aurait d’ailleurs plus logiquement dû être intitulé « pour ou contre l’indépendance », parce que c’était le cas. Notons que nos dirigeants d’alors, en votant diplomatiquement « oui à la Communauté » avaient explicitement dit « non à l’indépendance » de Ndoumbélaan. C’est ça les faits historiques, que notre jeunesse doit savoir, même si des nuances stratégiques peuvent être apportées par les acteurs pour rendre la pilule moins difficile à avaler.
Curieusement l’histoire officielle de Ndoumbélaan n’apporte pas beaucoup d’éclairage à notre jeunesse sur ce chapitre, se contentant d’évoquer l’absence de nos dirigeants à l’accueil du Général Colonial pour des raisons obscures, et les témoignages de griots chantant les louanges d’un avocat porte-parole, qui tint un « discours mémorable », qui ne figure pourtant sur aucune page de nos livres d’histoire.
Notre fierté nationale reste donc à ce jour, les faits d’arme d’une jeunesse à l’avant-garde de la lutte pour l’indépendance (les Porteurs de Pancartes), tenue à l’écart par une police aux aguets.
Plus de soixante ans après les faits, si l’actuel président de la République Néocoloniale, et toujours Monarque de l’Empire faisait le même pèlerinage pour les mêmes questions (toujours d’actualité), il trouverait encore sur son chemin l’héritière de cette jeunesse combattante, portant des pancartes ou derrière un clavier pour lui dire « basta ». L’exacerbation est d’ailleurs telle, qu’une telle éventualité reste fortement déconseillée.
En l’absence d’un Général Colonial et face à une jeunesse qu’on ne peut plus mettre sous embargo, c’est une presse porte-voix officiel de l’Empire, qui est revenue poser la même question : « pour ou contre la Communauté », et autrement, « pour ou contre l’indépendance ». C’est tout le sens du « test référendaire » sous la forme d’une l’interview négociée (enfin) de l’Indomptable, considéré comme un baromètre fiable de l’état d’esprit (ou de défiance) de notre peuple vis-à-vis de l’Empire.
Si chacun peut faire une interprétation de sa réponse, il faut s’attendre à des réactions de l’Empire qui ne manquera de donner une suite, selon les conclusions de ses analyses. En tout cas, une nouvelle page à définir va s’ouvrir, rendant possible de nouvelles perspectives, certes avec ses hauts et ses bas, mais aussi la certitude que désormais, rien ne se fera plus comme avant. Mais fidèle à sa logique de prédation l’Empire ne fera rien en dehors de ses intérêts. « Ce n’est pas le début de la fin, mais seulement la fin du début » comme le disait Wilson Churchill après la première victoire militaire sur les forces nazies ». Le Général Colonial ne disait-il pas en 1961 : « la décolonisation est notre intérêt et par conséquent notre politique. Pourquoi resterions-nous accrochés à des dominations couteuses, sanglantes et sans issues alors que notre pays reste à renouveler de fond en comble ? » La suite se passe de commentaires !
LES NOUVELLES CHRONIQUES DE BANDIA, Janvier 2023