I- CONTEXTE
La politique sanitaire de notre pays, à l’instar de tous les pays en développement est traversée par des lignes de force liées d’abord à l’atteinte des OMD (Objectifs du Millénaire pour le Développement), puis à la lutte contre la pauvreté, consacrée par les documents stratégiques de réduction de la pauvreté (DSRP I et II) et enfin à la gestion axée sur les résultats pour le développement, dans le cadre de l’amélioration de l’efficacité de l’aide au développement.
A un peu plus de cinq ans de la date retenue pour l’atteinte des OMD, le pouvoir libéral, à l’instar d’institutions internationales complaisantes essaient d’utiliser l’alibi de la crise financière mondiale pour justifier les retards mis en évidence par les évaluations annuelles. Ainsi le rapport sur l’état d’avancement des OMD de 2009 met en évidence des tendances préoccupantes telles que :
– l’aggravation de l’état nutritionnel des enfants des pays en développement, dont plus d’un quart souffrent d’un retard de croissance,
– et la lenteur des progrès concernant les programmes pour améliorer la santé maternelle, qui ont bénéficié de très peu de financements.
Pour rappel, les objectifs du Millénaire pour le développement fixés par les Nations Unies sont au nombre de huit et l’ensemble des 191 États Membres des Nations Unies ont convenu de s’efforcer de les atteindre d’ici 2015. La Déclaration du Millénaire des Nations Unies signée en septembre 2000 comprend huit objectifs dont trois sont directement liés à la santé:
– réduire la mortalité de l’enfant de moins de cinq ans,
– améliorer la santé maternelle,
– et combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies;
Certes des phénomènes tels que la réduction d‘opportunités commerciales pour les pays en développement et la baisse de l’aide financière venant des pays du Nord sans oublier les changements climatiques correspondent à des réalités tangibles. Il n’en demeure pas moins que cette crise est aussi due à une politique faite de clientélisme politicien, d’achat de conscience, de corruption à l’échelle industrielle induisant un train de vie dispendieux de l’Etat.
Aujourd’hui, notre pays ne répond à aucun des huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), mais prétend en avoir rempli deux (objectifs 2 et 4) et ambitionne de pouvoir en atteindre cinq autres (objectifs 1, 3, 6, 7, 8), avec les changements attendus à la suite de la mise en œuvre du Document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP-2) pour 2006-10.
Sur le plan de la lutte contre la pauvreté, la première phase du Plan national de Développement sanitaire (PNDS), avait pour ambition de «promouvoir l’accès aux services socio-sanitaires pour les populations pauvres » à travers :
– l’amélioration de l’accès des pauvres aux services médicaux;
– le développement des services de santé à base communautaire et
– l’amélioration des conditions d’hygiène et d’assainissement en zone rurale et périurbaine
De l’aveu même des officiels du gouvernement, le secteur reste caractérisé par une insuffisance en infrastructures sanitaires et sociales et en prestation de services. Le personnel de santé est mal réparti sur l’ensemble du territoire national en particulier au niveau des zones pauvres et reculées, peu motivé à exercer ses activités en dépit des efforts du Gouvernement.
D’autres contraintes spécifiques ont été identifiées, dont le non respect des normes d’implantation des infrastructures de santé, l’existence de pratiques délictuelles (surfacturation, corruption…), l’inaccessibilité des médicaments de base, le peu de soutien aux mutuelles de santé et la négligence dont sont victimes les maladies non transmissibles ou liées à la vieillesse.
En ce qui concerne les effets nocifs de la pollution sur la santé, outre ceux qui concernent la population générale (rejets industriels gazeux, eaux souillées…), il y en a qui atteignent principalement les couches pauvres, à savoir le plomb dans la banlieue dakaroise (enfants de Ngagne Diaw), les pesticides obsolètes en zone rurale, les déchets biomédicaux et les déchets infectieux.
Dans le cadre de la gestion de ces déchets, le Sénégal fait face entre autres au problème des coûts d’élimination et à l’absence d’équipement approprié de collecte, de transport et d’élimination des déchets infectieux. Concernant le cadre de vie urbain, il faut retenir que la tendance à l’urbanisation de la population de notre pays, (qui est passée de 25% en 1960 à 41% en l’an 2002) n’a fait que s’accentuer ces dernières années, à cause des désastreuses campagnes de commercialisation agricoles. Par ailleurs, il faut noter que dans la plupart des villes, les zones insalubres et impropres à l’habitation représentent 30 à 40% de l’espace occupé, et concentrent une proportion importante de population. L’absence d’évaluation environnementale et le non-respect des schémas d’urbanisme dues à une boulimie foncière, qui s’est accentuée depuis l’arrivée de l’équipe libérale au pouvoir dans notre pays sont à l’origine d’inondations, qui provoquent une détérioration tragique des conditions d’hygiène et de santé dans les quartiers populaires de la grande banlieue dakaroise.
Toujours, dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, il est notoire que l’écrasante majorité des Sénégalais ne disposent pas de protection sociale. Elle ne couvre, en effet que 7,8% de la population dans un environnement marqué par la prédominance des exploitations familiales (dans l’agriculture, l’artisanat, etc.) et l’extension du secteur informel, principal refuge des sans-emplois en particulier des femmes. Dans le même temps, on observe dans le secteur dit moderne, l’existence de dispositifs formels de protection sociale basés sur la couverture des fonctionnaires et autres salariés contre les risques (la sécurité sociale (CSS, IPM, IPRES, FNR), les assurances privées, les mutuelles professionnelles complémentaires.
Aucune politique nationale d’exemption n’est prévue pour les malades indigents. Le système d’assistance (cas sociaux, certificat d’indigence) a des critères d’identification des indigents peu précis et peu discriminants, se faisant à la tête du client et profitant davantage aux cadres moyens et supérieurs ou à la clientèle politique des patrons locaux.
De leur côté, les autorités sanitaires semblent plus enclines à maximiser le recouvrement des coûts qu’à favoriser l’accès aux soins. Les mutuelles, qui auraient dû atténuer les travers de l’inaccessibilité financière des structures sanitaires sont confrontées à des difficultés diverses (irrégularités des cotisations, difficultés d’accès aux médicaments, problèmes de remboursement …etc.)
Face aux nombreuses entorses à l’orthodoxie budgétaire ayant jalonné l’exécution des plans nationaux de développement sanitaire, (y compris celle du PDIS) et tenant compte de l’inefficacité budgétaire faisant reposer l’essentiel des dépenses de santé sur les ménages, même dans le secteur dit public, il était urgent de réformer les procédures de gestion. C’est ainsi que même s’il est clair que les ressources allouées au secteur de la santé demeurent insuffisantes au regard des enjeux du financement de l’offre, la problématique semble plus relever d’un déficit de transparence et de déficits criards dans la gouvernance sanitaire.
C’est ce qui a conduit la déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide au développement à promouvoir au rang d’exigence pressante, l’existence dans les pays bénéficiaires de l’aide, de « cadres d’évaluation des performances, transparents et se prêtant à un suivi, permettant d’évaluer les progrès réalisés en ce qui concerne aussi bien les stratégies nationales de développement que les programmes sectoriels ».
Il ne s’agit, ni plus ni moins que de la promotion de la gestion axée sur les résultats, qui implique, outre une participation effective des acteurs concernés, une distribution plus équitable des ressources mais aussi des informations, aussi bien sur le plan interne qu’en liaison avec toutes les parties prenantes (Partenaires Techniques et Financiers, collectivités, autres départements ministériels, secteur privé, organisations de la société civile, associations de consommateurs, Universités et autres institutions de formation).
Cette dynamique de partage des informations, de renforcement de la communication aussi bien interne qu’externe, gagnerait en efficacité par une application des textes en vigueur et la mise en œuvre des directives, circulaires et mesures prises pour l’amélioration de la gestion du secteur, en mettant un terme à l’instabilité institutionnelle caractéristique du Secteur depuis 2000.
La gestion axée sur les résultats induit également le renforcement de la planification à la base et une meilleure allocation des ressources, car la répartition équitable des ressources et leur utilisation judicieuse constituent, en effet, les domaines critiques pour l’implantation du Cadre de Dépenses Sectorielles à Moyen Terme (CDSMT).
Une évaluation des capacités existantes (CAP-Scan) doit précéder la mise en œuvre de la gestion axée sur les résultats.
Le bilan du plan national de développement sanitaire de la période 1998-2009, montre que même si quelques acquis tels que le maintien de la prévalence de l’infection à VIH dans la population générale à moins de 1% ou la baisse de la morbi-mortalité due au paludisme ont été engrangés, on note cependant des reculs marqués notamment par le niveau encore élevé des indicateurs de la mortalité maternelle, de la mortalité néonatale, de la mortalité infantile et de la mortalité infanto juvénile ainsi que l’insuffisance de la prévention et de la prise en charge des affections courantes, y compris les urgences médico-chirurgicales.
1-1- CADRE INSTITUTIONNEL
Le système de santé du Sénégal est organisé selon une structure pyramidale à trois niveaux : central, intermédiaire constitué par les Régions Médicales et périphérique appelé district sanitaire.
Le niveau central regroupe, outre le Cabinet du Ministre, le Secrétariat Général, des Directions (Direction de la Santé ; Direction de la Pharmacie et des Laboratoires ; Direction des Etablissements de Santé ; Direction de la Prévention médicale ; Direction des Ressources humaines ; Direction des Equipements et de la Maintenance ; Direction de la Prévention individuelle et Collective ; Direction de l’Administration générale et de l’Equipement.) et des Services rattachés.
Dans le cadre de la gestion du ministère, on note des dysfonctionnements dus à la multiplicité des services rattachés et à la non prise d’arrêtés d’application du décret 2004-1404 du 04 novembre 2004 portant sur l’organisation. Les missions des directions, divisions et services régionaux ne sont pas clairement précisées. Il y a des conflits de compétence.
L’instabilité institutionnelle que connait le ministère de la santé perturbe la mise en œuvre de plusieurs décisions et réformes dans le secteur.
Le Service National d’Information Sanitaire (SNIS) ne prend pas en compte le système d’information médical des hôpitaux et n’est pas ouvert aux autres secteurs ayant des actions de santé qu’il s’agisse du secteur privé, des autres ministères, des organisations internationales, etc. Les données collectées sont souvent incomplètes et manquent de qualité et d’exhaustivité. Il s’y ajoute une insuffisance de coordination du fait de l’interférence des programmes qui ne tiennent pas compte de la périodicité des rapports fournis par les différents niveaux.
Sur le plan de la recherche en santé, on constate une faiblesse du partenariat avec l’Université, les Instituts de recherche et le secteur privé. La coordination de la recherche en santé et l’éthique est assurée par une division. Cependant, il arrive que des activités de recherche au sein du Ministère de la Santé et de la Prévention (MSP) échappent à son contrôle et à sa supervision.
1-2- RESSOURCES HUMAINES
On observe non seulement une non atteinte des indicateurs de couverture en personnel fixés dans le PNDS 1998-2007 à cause de recrutements insuffisants dans les écoles de formation, la non maitrise de l’embauche de nouveaux agents qui est du ressort de la Fonction Publique mais aussi une inégale répartition sur l’étendue du territoire national avec un déficit en personnel accentué au niveau des zones difficiles et éloignées de la capitale. On observe en effet une sorte « d’exode rural » des personnels de santé en direction sinon de la capitale, tout au moins des grandes villes, quand il ne s’agit pas purement et simplement de « fuite de cerveaux » vers des ONG ou par le biais de réussite à des concours vers des Ecoles ou Instituts de formations de techniciens supérieurs ou de spécialistes.
Des indemnités d’éloignement, la contractualisation des postes dans les structures situées en zones difficiles avec des salaires plus attractifs sont autant de mesures palliatives qui ont été expérimentées mais qui gagneraient à être pérennisées.
En conclusion, on note une insuffisance de ressources humaines faute de politique adéquate de formation, et de gestion du personnel et une inégale répartition, au détriment des localités périphériques. En outre, la politisation de la gestion des structures sanitaires entraine un recrutement pléthorique d’agents communautaires ou de personnels de soutien.
On note un déficit criard de spécialistes médicaux et paramédicaux (puériculture, kinésithérapie, instrumentistes…).
Il faut radicalement prendre en compte les mutations intervenues dans le secteur à telle enseigne qu’il est impératif de voir l’émergence de nouveaux métiers [1]
1-3- INFRASTRUCTURES, EQUIPEMENT ET MAINTENANCE
Les objectifs en matière de construction de nouvelles infrastructures n’ont pas été atteints, l’accent ayant surtout été mis sur la réhabilitation des centres de santé. On a également observé des retards dans la construction et l’équipement de nouvelles structures. En témoigne la situation des chantiers des hôpitaux de Fatick et de Ziguinchor ainsi que les centres de santé de Samine, de Goudomp, de Ranérou et de Khombole…etc.
Douze districts sanitaires n’ont pas de centre de santé fonctionnel.
La région médicale de Matam, créée en 2002 et celles des trois nouvelles régions qui ont été créées en 2008 à savoir Kédougou, Sédhiou et Kaffrine ne disposent pas encore de locaux propres.
Les régions de Fatick, Kaffrine, Sédhiou et Kédougou ne disposent pas encore d’hôpital à l’heure actuelle.
Il y a au total
– soixante dix centres de santé situés dans soixante cinq districts sanitaires
– vingt hôpitaux, dont ceux de Fatick et de Ziguinchor.
Le secteur privé compte 1 hôpital privé confessionnel, 32 cliniques, 70 maternités, 131 cabinets médicaux et 77 postes de santé privés, 843 officines de Pharmacie, 5 Grossistes répartiteurs, 3 Industries pharmaceutiques et l’Institut Pasteur de Dakar devenu Fondation de droit sénégalais en décembre 2008 et qui fabrique le vaccin antiamaril.
Les structures privées de santé (cliniques, cabinets médicaux et paramédicaux, officine de pharmacie, cabinets dentaires, laboratoires d’analyses …) permettent de résorber le chômage parmi les professionnels de la santé et à certaines couches de la population d’accéder aux soins. Cependant, on note une répartition inéquitable des structures privées à travers le pays. Le contrôle de qualité fait défaut. Les statistiques du secteur privé ne sont pas prises en compte dans le système national d’information sanitaire. Les acteurs de secteur privé ne sont souvent pris en compte dans les sessions de formation continue.
On remarque assez souvent le non-respect des normes architecturales dû au fait que les travaux de construction sont attribués de manière complaisante à des entrepreneurs inexpérimentés.
Par ailleurs, l’achat prématuré d’équipements avant la réception des bâtiments conduit à un stockage prolongé des matériels biomédicaux, entraînant leur détérioration ou leur disparition.
Le secteur pharmaceutique est subdivisé en plusieurs entités qui sont :
– Direction de la Pharmacie et des laboratoires (DPL) : Elle élabore et veille à l’application des textes législatifs et réglementaires relatifs à la pharmacie, aux médicaments et aux réactifs de laboratoire. Cette direction réglemente l’exercice de la profession pharmaceutique et assure la promotion de la pharmacopée traditionnelle.
– Laboratoire National de Contrôle des médicaments (LNCM) : Il a pour vocation le contrôle technique de la qualité des médicaments en collaboration avec la DPL.
– Pharmacie Nationale D’Approvisionnement (PNA) : est un établissement public de santé ayant pour mission de permettre l’accessibilité financière et géographique des médicaments de qualité aux populations. Elle assure l’approvisionnement des PRA, qui à leur tour servent les districts sanitaires, centres de santé et poste de santé.
– Grossistes-Répartiteurs : Actuellement au nombre de cinq au Sénégal (LABOREX, COPHASE, ECOPHARM, SODIPHARM, SOGEN) en plus de la PNA, ils importent les spécialités et génériques. Les médicaments sont exonérés de droit de douane hormis le Tarif Extérieur Commun (TEC) qui est de 2,5 appliqué sur tous médicaments importés hors zone UEMOA et CEDEAO
– Etablissements de Fabrication : L’industrie pharmaceutique au Sénégal est composée de trois unités qui assurent 10 à 15% des besoins nationaux en médicaments.
– Structure de Dispensation : Elles sont représentées par les officines de pharmacie, les pharmacies hospitalières et les dépôts privés.
La chaîne de froid essentielle pour les programmes de vaccination n’a pas été renouvelée depuis 2002 traduisant le problème global d’absence de plan de renouvellement des équipements.
La DEM (Direction des Equipements et de la Maintenance) est très peu fonctionnelle et ne dispose pas de structures décentralisées au niveau des districts et régions médicales et on constate la mise en place très fréquente d’équipements parfois non adaptés et/ou non prioritaires.
Le système de gestion de la logistique est défectueux voire inexistant (suivi du mouvement des matières, respect des normes d’amortissement…etc).
1-4- SYSTEME DE REFERENCE CONTRE REFERENCE
L’offre de soins épouse l’architecture de la pyramide sanitaire. Au sommet, l’hôpital constitue la référence, suivi du centre de santé au niveau intermédiaire et des postes de santé au niveau périphérique. Ce dispositif est complété par l’offre du secteur privé à tous les échelons de la pyramide sans qu’il existe, toutefois, une correspondance parfaite entre les plateaux techniques des deux systèmes à chaque niveau.
On observe cependant que ce système d’orientation-recours est très fréquemment contourné par les patients, créant des situations d’encombrement dans les grands hôpitaux nationaux.
1-5- FINANCEMENT DE LA SANTE
Selon les documents du gouvernement, le secteur de la santé a reçu au terme du PNDS 1998-2007, un financement de 933,2 milliards de F.CFA, soit un taux de réalisation financière de 96,8%.
L’Etat a été le principal pourvoyeur en ressources financières du secteur de la santé dans la mise en œuvre du PNDS, avec un apport de 475,96 milliards de FCFA, représentant 51% de du financement. Il est suivi par les partenaires extérieurs avec un apport au financement de 249,52 milliards de FCFA, représentant 26,7%. Viennent ensuite les populations et les Collectivités Locales pour respectivement 19,3% et 3%. Pour le cas particulier des collectivités locales, les contributions financières ont été très en deçà des prévisions pour l’ensemble des deux phases. Dans la plupart des collectivités locales, seuls les fonds de dotation arrivent aux structures sanitaires.
En plus des différents impôts et taxes, les populations supportent prés de 20% des dépenses en santé.
Les comptes nationaux de la santé ont également mis en évidence l’importance du secteur privé dans la formation de la Dépense nationale de santé (DNS). Pour l’année 2005, ces comptes évaluent cette contribution à 109,42 milliards sur un total de 254,20 milliards FCFA soit 43% de la DNS. Dans la participation du privé, les ménages occupent, de loin, la première place avec 87%.
Les apports financiers de plusieurs partenaires au développement ne sont pas maîtrisés par l’Etat.
L’audit régulier des structures de gestion des ressources de la santé (humaines, financière et logistique) n’est pas fait. La culture du « rendre compte » tarde à entrer dans la pratique au niveau des responsables du ministère de la santé.
L’allocation des ressources aux différents échelons de la pyramide sanitaire ne répond pas à des critères d’équité et d’efficacité, les services centraux se taillant la part de lion des financements. Seulement 3% du financement arrivent aux postes de Santé qui sont les structures de proximité fréquentées surtout par les couches pauvres de la population.
Le financement des activités du niveau opérationnel est souvent imputé aux fonds provenant de la participation financière des populations à l’effort de santé, devenus de plus en plus réduits.
Sur le plan de l’assurance maladie, il n’existe pas encore de couverture maladie généralisée à l’ensemble de la population malgré la part importante des ménages dans la prise en charge des dépenses de santé. Le taux de couverture risque maladie se situe autour de 20%.
Des couches importantes de la population sont exclues de la couverture de risque maladie (ex : agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, artisans…) malgré l’apparition de mutuelles de santé qui brillent par leur caractère éphémère.
Le préfinancement du plan Sésame par les structures de santé et le non respect de ses engagements de remboursement par l’Etat mettent les hôpitaux et centres de santé dans des situations de tension de trésorerie et d’indisponibilité de services.
1-6- POLITIQUE DU MEDICAMENT
Dans le cadre de la mise en œuvre du PNDS 1998-2007, des réformes du secteur pharmaceutique ont été entreprises pour assurer l’accès de tous aux médicaments essentiels de qualité et à moindre coût.
La politique d’accès aux médicaments essentiels souffre d’une mauvaise gestion à tous les niveaux (PNA, PRA, dépôts de pharmacie) qui entraine des ruptures fréquentes.
L’érection de la Pharmacie Nationale d’Approvisionnement (PNA) en EPS n’a pas encore donné les résultats escomptés en matière de gestion.
Le laboratoire National de Contrôle des Médicaments (LNCM) ne dispose pas de moyens pour assurer sa mission. Il a des difficultés à mobiliser son budget obtenu par le financement de l’Etat et l’appui de la Banque Mondiale et de l’Union Européenne.
La réglementation pharmaceutique n’est pas appliquée dans sa globalité par insuffisance d’inspecteurs assermentés.
Le non-respect des marges bénéficiaires sur les médicaments essentiels au niveau des structures sanitaires en est aussi un facteur limitant d’accessibilité aux populations démunies.
Le marché illicite des médicaments : Il constitue un réel danger pour les populations et se développe régulièrement. Actuellement, il représente un chiffre d’affaires de 14 Milliards de francs CFA.
Le secteur public accuse un déficit qualitatif et quantitatif en termes de ressources humaines. Il représente seulement 10,6% soit 114 pharmaciens sur 1066 inscrits à l’Ordre. Le personnel utilisé pour gérer les dépôts des formations sanitaires est souvent non qualifié et non formé.
La loi relative à l’exercice de la médecine traditionnelle n’est pas encore adoptée mais fait l’objet d’un consensus. Des études sur l’intérêt économique de l’utilisation des plantes ont été effectuées par l’UCAD et ENDA. Les difficultés dans ce domaine sont liées au fait que les résultats de ces recherches n’ont pas jusqu’ici été vulgarisées et valorisées.
La faiblesse de la satisfaction des besoins en médicaments par le secteur industriel pharmaceutique est due aux coûts de production élevés, aux taxes sur les matières premières, à l’étroitesse du marché sénégalais ainsi qu’à la rude concurrence des grands groupes pharmaceutiques.
On note un faible investissement dans le domaine de la recherche, une insuffisance dans l’exploitation et la valorisation des résultats obtenus.
1-7- REFORME HOSPITALIERE
Selon les documents officiels, le but de la Réforme Hospitalière est d’améliorer les performances des hôpitaux aussi bien sur le plan de la gestion que celui de la qualité des soins.
Au sein de l’établissement sanitaire est créé le Conseil d’Administration, qui est une entité chargée de définir les orientations stratégiques de l’établissement, d’approuver la gestion et de déterminer les actions à mener. Cette entité dont les membres viennent d’horizons très divers (associations d’usagers, population, municipalités, personnel de l’établissement) n’assure pas la gestion quotidienne de l’établissement sanitaire, qui est confiée à une direction exécutive. La Commission Médicale d’Etablissement (CME) a été instituée pour permettre l’implication du corps médical à la définition des orientations stratégiques ainsi qu’à l’élaboration du Projet d’Etablissement, mais elle n’a qu’un rôle consultatif. Le Comité Technique, présidé par le Directeur a pour rôle de s’occuper des questions touchant à l’hygiène, à la sécurité et aux plans de formation. Y siègent les représentants de chaque catégorie de personnel.
L’autonomie de l’hôpital est mal assumée, conduisant à plusieurs travers, dont les effectifs pléthoriques et un faible pourcentage de personnel qualifié.
On note le retard de mise en place et le faible taux d’exécution des budgets provenant de l’Etat et de ses démembrements. Ces budgets ne répondent pas à des critères d’allocation pertinents.
On note une insatisfaction des populations par rapport aux services, et la dette hospitalière s’accentue. Tout ceci est le résultat d’une mauvaise gestion et de l’insuffisance de l’implication des travailleurs et des consommateurs dans la planification, le contrôle l’exécution budgétaire.
1-8- SANTE ET DECENTRALISATION
Dans le domaine de la décentralisation, beaucoup de réformes ont été prises pour aboutir à celle de 1996 qui érige la région en collectivité locale. Un transfert de neuf domaines de compétences, dont la santé, de l’Etat central aux collectivités locales a été effectué. Ainsi, les communes et communautés rurales ont la charge d’assurer le fonctionnement et la maintenance des structures sanitaires, qui relèvent de leur aire de responsabilité.
Il s’est agi, notamment, de faire face aux difficultés notées dans les relations entre les responsables de la santé et les élus au niveau local. Les rapports souvent difficiles entre ces deux parties prenantes du système au niveau local ont été, entre autres, à l’origine des dysfonctionnements des organes de gestion. Les comités de gestion n’ont pas été installés dans la plupart des cas. Et quand ils le sont, leur niveau de fonctionnalité est resté globalement faible. Par ailleurs, certaines collectivités locales ne libèrent pas la totalité des crédits alloués aux formations sanitaires sous leur tutelle. De l’avis des deux parties, la décentralisation fait encore l’objet de beaucoup d’incompréhensions entre les professionnels et les autorités locales.
La santé est un secteur technique et un domaine de compétence nouveau pour les collectivités locales, alors que leurs capacités administratives sont toujours limitées. Enfin, les collectivités locales sont des entités politiques où les processus de décision n’obéissent pas uniquement à des considérations techniques.
1-9- ENSEIGNEMENTS TIRES DE LA MISE EN ŒUVRE DU PNDS 1998-2007
Il a été noté plusieurs dysfonctionnements, à savoir :
– un défaut de coordination des interventions des partenaires malgré les bénéfices tirés de l’approche sectorielle (plus de ressources mobilisées pour le secteur),
– une absence de plan de suivi-évaluation doublée d’une insuffisance de cohérence et de précision du cadre de mise en œuvre du PNDS, qui a été à l’origine de plusieurs difficultés, dont le retard dans les étapes de restitution et de validation des plans d’opérations annuels,
– des dysfonctionnements dans le processus de planification, n’ayant permis de réaliser ni un plan de réalisation des infrastructures et des équipements ni celui relatif au développement des ressources humaines, malgré l’adoption d’une carte sanitaire et la création d’une D.R.H,
– des disparités dans le financement des programmes à différents échelons de la pyramide sanitaire liées à l’absence de critères pertinents et partagés d’allocation des ressources,
– une absence de culture de reddition de comptes et de nécessité du contrôle citoyen, autant de points d’appui à l’amélioration de la gouvernance sanitaire,
– la non-appropriation du CDSMT comme cadre de programmation et d’exécution budgétaire par les hauts fonctionnaires du Ministère de la santé.
1-10- PERFORMANCES DU SECTEUR
Elles ont été plus que mitigées au regard des nombreuses insuffisances ayant marqué la mise en œuvre du PNDS 1998-2007, dont les objectifs généraux étaient au nombre de trois :
(i) Réduire la mortalité maternelle,
(ii) Réduire la mortalité infanto juvénile et
(iii) maîtriser la fécondité.
Au terme de sa mise en œuvre, les résultats suivants ont été enregistrés :
– le taux de mortalité maternelle est passé de 510/100 000 naissances vivantes en 1992 à 401/100.000 naissances vivantes en 2005 ;
– le taux de mortalité infanto-juvénile est passé de 150‰ en 1997 à 121‰ en 2005 ;
– le taux de mortalité infantile de 70,1‰ en 1997 à 61‰ en 2005.
– l’indice synthétique de fécondité est passé de 6,0 en 1992 à 5,3 en 2005.
L’absence de quantification des objectifs ne permet pas d’apprécier l’efficience (coût/efficacité) des actions mises en œuvre.
II- VISION
Notre vision est celle d’un pays dans lequel, l’équité, la justice sociale et la responsabilisation pleine et entière des communautés dans tous les aspects de leur vie permettent un accès universel aux services complets et intégrés de santé à tous les citoyens bénéficiant de conditions de vie dignes, dans un environnement sûr et épanouissant.
III- PRIORITES SANITAIRES
1) au niveau institutionnel :
Il urge de redéfinir un cadre plus approprié, d’une cohérence interne certaine pour un meilleur management avec une mission de nature administrative faisant appel à des connaissances économiques, juridiques et organisationnelles ;
2) au niveau des moyens :
v humains : mettre en corrélation la pénibilité, la disponibilité des agents avec des effectifs découlant des normes admises ;
v matériels et infrastructures : plateaux techniques relevés, infrastructures adaptées avec une bonne distribution géographique ;
v financiers : budgets conséquents, rationnels et rationalisés dans le cadre d’une gestion pertinente ;
3) au niveau général :
Un effort collectif est nécessaire pour réduire ici et maintenant la menace représentée par l’homme lui-même pour la santé et l’environnement.
4) au niveau des objectifs
4-1- Réduire la mortalité maternelle
4-2- Réduire la mortalité infanto juvénile
4-3- Améliorer la prise en charge des couches pauvres de la communauté et des groupes vulnérables
4-4- Instaurer dans toutes les communautés une hygiène propice au maintien de la bonne santé des individus
IV- PROGRAMME ALTERNATIF
Il est centré autour nos réalités propres et des préoccupations identifiées par les masses populaires elles-mêmes et portées par des forces sociales progressistes, œuvrant pour un développement national véritable.
Une véritable alternative ne saurait donc se réduire à une simple course-poursuite en vue de l’atteinte des OMD. Il faudra néanmoins prendre en compte les 8 objectifs des OMD pour une couverture effective des couches pauvres de la population, étant donné le caractère transsectoriel de la Santé, dont les déterminants sont liés au pouvoir d’achat, à la nutrition, au niveau d’éducation, à l’approche genre, à l’assainissement et à l’environnement.
- Repenser le processus de participation communautaire à la Santé, par une responsabilisation véritable des communautés sur tous les aspects touchant à leur vie, de la planification (incluant le diagnostic) à l’évaluation en passant par la mise en œuvre ;
- Outiller davantage les collectivités locales en capacités de gestion et de management et en moyens financiers pour leur permettre de jouer véritablement leur rôle dans le processus de transfert de la compétence Santé ;
- Créer les conditions d’une meilleure synergie entre collectivités locales et Etat Central pour la mise en œuvre optimale du processus de décentralisation dans tous les domaines et plus particulièrement le secteur de la Santé ;
- Améliorer la qualité organisationnelle des structures de coordination, mise en œuvre et suivi-évaluation-audit ;
- Assurer la disponibilité des ressources humaines compétentes dans toutes les structures de santé ;
- Assurer bonne accessibilité physique aux services de santé, en respectant les normes de l’OMS pour ce qui est de la couverture en infrastructures sanitaires ;
- Restaurer un secteur public (prédominant) digne de confiance, tout en permettant l’accompagnement d’un secteur libéral qui devra agir en interrelation avec le secteur précité afin de rendre sauf un accès équitable aux soins, surtout d’urgence :
- Assurer la disponibilité des ressources matérielles de bonne qualité dans toutes les structures de santé ;
- Assurer l’opportunité et la continuité des services à tous les échelons de la pyramide sanitaire, en veillant à la pertinence du système d’orientation-recours selon les échelons de la pyramide sanitaire ;
- Assurer la bonne qualité technique de toutes les prestations des services de santé en prenant en compte la sécurité des patients qui est un impératif ;
- Améliorer la couverture sociale des citoyens, par l’assainissement de la gestion des institutions existantes ;
- Mettre en place un système performant de protection sociale pour les travailleurs en milieu urbain ;
- Assurer la promotion des mutuelles de santé pour les citoyens du monde rural, du secteur informel et des banlieues des grandes agglomérations ;
- Renforcer le leadership du mouvement syndical dans le Secteur de la Santé
- Promouvoir la recherche en Santé en veillant au respect rigoureux des normes d’éthique dans les protocoles de recherche en rapport avec le Comité National prévu à cet effet.
- Appliquer les mesures suivantes en matière de politique du médicament
– Former et recruter du personnel dans le secteur de la Pharmacie
– Perfectionner la capacité technique et opérationnelle des pharmaciens inspecteurs
– Réactualiser les textes en vue de la mise en place d’un dispositif législatif et réglementaire adéquat
– Faire une évaluation nationale des besoins en médicaments
– Optimiser le circuit de distribution des médicaments, y compris les médicaments traditionnels améliorés (MTA)
– Renforcer la complémentarité public/privé dans l’approvisionnement des médicaments essentiels
– Tarir les sources d’approvisionnements illicites des médicaments
– Développer l’IEC en vue de la promotion des médicaments génériques
– Renforcer des activités de laboratoires en vue de mettre en place un système d’assurance qualité reposant sur l’homologation, le contrôle qualité et la pharmacovigilance ;
– Soutenir les programmes de recherche
– Créer les conditions nécessaires pour attirer les investissements dans le secteur de la production locale et faciliter l’accès au financement
[1] Différentes spécialités médicales ; infirmiers anesthésistes, infirmiers du bloc opératoire, infirmiers puéricultures ; médecins de rééducation : masseur kinésithérapeute, pédicuro-podologue, ergothérapeute, prothésiste, orthophoniste, opticien-lunetier, diététicien ; métiers médico-techniques : manipulateur en électroradiologie médicale, préparateur en pharmacien, technicien en analyses biomédicales, ambulancier ; filière administrative et les métiers non soignants.
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